M I N O R I T É S . O R G
INDEX
ARTICLES
ENTRETIENS
ANALYSES
DOCUMENTS
HUMEURS
CONTACT
RECHERCHE
NEWSLETTER
AUTEURS
PUBLICATIONS
Etats-Unis 20.000 manifestants à Jena contre un procès contesté contre six jeunes afro-américains
Vatican Le Pape refuse de recevoir Condoleeza Rice
Etats-Unis Rudy Giuliani a-t-il un "problème noir"?
France Guerre d’Algérie: Mémoire sélective
France L'évêque demande au juge d'évacuer les sans-papiers d'une église de Massy
France Les Noirs américains se mobilisent pour "les six de Jena", accusés de tentative de meurtre
Israël Israël: Les oubliés de la Shoah
Palestine À Gaza, le Fatah relève la tête le jour de la prière
Pays Basque L’ETA "continuera à frapper" l'Espagne
France La gérante d'une agence immobilière condamnée pour discrimination
Egypte "Bien que "nue", je suis prête à défendre les Frères musulmans"
Birmanie Quatrième jour de manifestation des bonzes birmans
Turquie En Turquie, le gouvernement relance la polémique sur le voile
Italie La bible du parrain sicilien Provenzano expertisée par un théologien
Vatican Benoît XVI plaide pour "un dialogue sincère" avec l'islam
France La Ville de Paris organise une soirée musicale pour le ramadan à Paris-Bercy
Israël / Palestine Des milliers de Palestiniens empêchés d'entrer à Jérusalem pour la prière
Arabie Saoudite La présence d'une fille de 12 ans interrompt un match de foot en Arabie séoudite
Islam / Monde musulman Ahmadinejad avertit le roi Abdallah contre les diviseurs de l'islam
Israël Madonna en Israël avec d'autres stars adeptes de la Kabbale
Sénégal Le ramadan débute officiellement vendredi au Sénégal
Etats-Unis Bush salue les musulmans observant le ramadan
Canada Des femmes et un homme votent le visage voilé à des élections canadiennes
Allemagne L'avocat du révisionniste allemand Ernst Zündel renvoyé devant les tribunaux
Turquie Gül et Erdogan se disent pour la fin de l'interdiction du voile islamique
LES 100 DERNIERS ARTICLES
France Mercredi 20 Juin 2007 mis en ligne par Abu Dabi
Le titre du Monde parle de "les" associations, mais on devrait en fait parler de "des" associations...
Version imprimable de l'article
Envoyer cet article à un ami
En banlieue, les associations saluent "l'ouverture à la diversité"

LE MONDE | 20.06.07 | 12h44 • Mis à jour le 20.06.07 | 15h29
http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-823448,50-925926,0.html

Au téléphone, Dominique Sopo, président de SOS-Racisme, éclate de rire quand il imagine Fadela Amara, nouvelle secrétaire d'Etat à la politique de la ville et militante laïque, travailler avec Christine Boutin, sa ministre de tutelle et consultante officielle du Vatican pour la politique familiale. Mais, sur le fond, sur sa nomination et celle de deux autres femmes issues de l'immigration dans le gouvernement Fillon 2, le militant salue le message envoyé par la droite. "C'est une bonne chose. Avec ce gouvernement, on a une représentation de la diversité qui est une première dans ce pays."

La présence de trois ministres et secrétaires d'Etat satisfait les associations des quartiers populaires qui soulignent volontiers que la droite a réussi là où la gauche n'a fait que multiplier les promesses. "L'ouverture à la diversité n'a jamais été faite par la gauche mais par la droite, qui avait déjà promu des gens comme Tokia Saïfi ou Azouz Begag", réagit Azedine Haffar, président de l'Association nationale des élus de banlieue (ANEB). "Je ne suis qu'à moitié surpris de l'audace de Sarkozy. Ça révèle un peu plus la frilosité et l'effrayant esprit conservateur du Parti socialiste", ajoute Karim Zéribi, président du Parlement des banlieues, candidat indépendant et malheureux de la "diversité" pour les législatives à Marseille.

Alors que les choix de Rachida Dati, pour le ministère de la justice, et de Rama Yade, pour le secrétariat d'Etat aux droits de l'homme, ne soulèvent aucune polémique, la promotion de Fadela Amara est néanmoins critiquée par une partie des associations. D'abord parce que la nouvelle secrétaire d'Etat est accusée d'avoir donné une image trop négative des banlieues à travers la dénonciation des violences faites aux femmes et du sexisme des jeunes hommes. "Fadela Amara a été très attaquée par des associations qui estimaient qu'elle stigmatisait beaucoup trop les jeunes des quartiers", explique Sonia Imloul, présidente de Respect 93, membre du Conseil économique et social.

Dans un univers où les divisions sont parfois très profondes, des responsables associatifs l'accusent de parler des banlieues sans connaître le terrain et d'utiliser les médias pour son intérêt personnel. "Vu de Saint-Germain-des-Prés, elle donne peut-être l'impression d'être dans les quartiers. Mais pour ceux qui y travaillent, qui sont dans les tribunaux avec les jeunes, qui soutiennent les familles dans leurs tâches d'éducation, qui font du soutien scolaire, ça fait belle lurette qu'on n'entend plus parler d'elle", relève ainsi Stéphane Ouraoui, président de l'association Pas de quartier, tous citoyens, qui ne craint pas, contrairement à d'autres responsables, de parler à visage découvert.

"PILULE AMÈRE"

L'engagement de Mme Amara auprès de Nicolas Sarkozy, toujours aussi rejeté dans les cités populaires, risque d'ajouter une couche supplémentaire dans les critiques. Y compris parmi ses anciens soutiens. Au sein de l'association Ni putes ni soumises, qui faisait déjà l'objet de réactions hostiles en raison de ses prises de position féministes, on s'inquiète ainsi ouvertement des conséquences de la "trahison" de la fondatrice. "Notre démarche n'est jamais facile dans certaines cités. Sa nomination ne va pas simplifier le dialogue, certains comités locaux vont se trouver en difficulté", note Riva Gherchanoc, présidente du comité local de Seine-Saint-Denis.

Les annonces sur la composition du gouvernement n'effacent pas, par ailleurs, la profonde colère ressentie après les législatives. "Ces nominations au gouvernement peuvent créer un peu d'espoir. Mais la pilule reste amère après les élections que l'on vient de connaître : cela apparaît comme un cache-misère alors qu'aucun candidat aux législatives issu de la diversité n'a pu être élu", souligne Stéphane Ouraoui. Quant à l'impact pour l'image de Nicolas Sarkozy dans les banlieues, Dominique Sopo reste sceptique. "Une nomination ne change pas grand-chose dans l'image d'un président ou d'un gouvernement. Ce qui peut changer, c'est la politique mise en oeuvre, notamment la marge de manoeuvre donnée aux personnalités qu'on vient de nommer", note le président de SOS-Racisme.

Luc Bronner

--------------------------------------------------------------------------------
A gauche, Fadela Amara est très critiquée

Les réactions à gauche à la nomination de Fadela Amara, jusqu'à présent conseillère municipale (PS) de Clermont-Ferrand, comme secrétaire d'Etat à la politique de la ville n'ont pas tardé. Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS à l'Assemblée, a fait part de son "indignation et écoeurement". Jean Glavany (Hautes-Pyrénées, PS) a expliqué avoir la même réaction que pour les nominations de MM. Hirsch, Kouchner et Besson : "Qu'ils se regardent dans la glace. Nous, on a autre chose à faire." Claude Bartolone (Seine-Saint-Denis, PS) s'est dit "triste" : "C'est le paquet cadeau et les grosses ficelles". Clémentine Autain, adjointe (app. PCF) au maire de Paris, a jugé "pour le moins troublant l'alliage entre une militante qui se dit féministe et une tenante de l'ordre moral, hostile à l'avortement (Christine Boutin, sa ministre de tutelle)"

Article paru dans l'édition du 21.06.07




Fadela Amara, le pari d'une insoumise
LE MONDE | 20.06.07 | 15h19 • Mis à jour le 20.06.07 | 15h29
http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-823448,50-925976,0.html

L'une arbore une petite croix en or sur son tailleur bleu marine, l'autre porte une veste militaire kaki sur un pantalon noir, mais toutes deux se tiennent par le bras en faisant le tour du jardin de l'hôtel de Castries, où siège le ministère de la ville.

Christine Boutin et Fadela Amara admettent en souriant qu'elles forment un couple improbable. "Un couple paradoxal, un couple extraordinaire, plaisante la présidente de Ni putes ni soumises. Mais c'est un beau mariage, même s'il y aura sans doute, comme dans tous les mariages, de petites disputes."

Qui eût imaginé tandem plus déconcertant pour ce ministère chargé d'améliorer la vie dans les quartiers ? Christine Boutin, la pasionaria qui brandissait la Bible dans l'Hémicycle pendant les débats sur le pacs, la fondatrice de l'Alliance pour les droits de la vie pour qui l'avortement est un geste "eugéniste et inhumain", la "consulteur" du Conseil pontifical de la famille, un organisme de la Curie romaine fondée par Jean Paul II, travaillera désormais au côté de Fadela Amara, une féministe qui revendiquait en 2005 "la liberté durement acquise des femmes à disposer de leur corps" et la "lutte contre toutes les formes d'intégrisme et d'obscurantisme".

Jusqu'ici, elles ne s'étaient croisées que sur des plateaux de télévision. "Pour s'écharper", précise Christine Boutin dans un sourire. "Mais nous avions alors chacune un rôle à jouer, ajoute aussitôt la ministre du logement et de la ville du gouvernement de François Fillon. Maintenant, il s'agit d'autre chose : notre objectif est de faire en sorte qu'il n'y ait plus de quartiers sensibles. La nomination de Fadela Amara traduit la volonté de Nicolas Sarkozy de rassembler la France dans toutes ses différences. Fadela et moi, nous avons désormais un objectif commun : que chaque homme, chaque femme, chaque enfant, soit respecté sur notre territoire."

La présidente de Ni putes ni soumises avait été contactée une première fois par l'Elysée au lendemain de l'élection présidentielle, lors de la constitution du premier gouvernement Fillon. Elle avait alors décliné l'offre en affirmant qu'elle serait plus utile à la tête de son association. Mais lorsque son nom a une nouvelle fois circulé, au lendemain des élections législatives, elle a fini par sauter le pas. " J'ai un peu hésité car je suis une femme de gauche et que je l'assume. Mais j'ai dit oui parce que mon combat dépasse les clivages politiques et parce qu'il y a urgence. Je veux avoir des manettes pour transformer la vie dans les quartiers." Fadela Amara, qui a rencontré Nicolas Sarkozy à plusieurs reprises lorsqu'il était ministre de l'intérieur, assure qu'elle ne sera ni un alibi, ni la "minorité visible de service".

"Quand on connaît mon caractère de cochon, c'est difficile à imaginer !, sourit-elle. J'ai accepté de rejoindre le gouvernement parce qu'on m'a assuré que ma liberté de parole serait respectée. Quand on s'occupe de personnes discriminées, humiliées, oppressées, comme moi, on n'a pas le droit d'avoir des états d'âme. Je veux mettre mes mains dans le cambouis pour bâtir une vraie politique de la ville."

Fadela Amara connaît bien les cités pour y être née, il y a quarante-trois ans. Son père, un Kabyle algérien qui travaillait dans le bâtiment, est arrivé à Clermont-Ferrand en 1955, avant de repartir au pays épouser la fille de son cousin germain, de vingt-deux ans sa cadette. "Ils se sont installés dans une cité supposée être de transit à l'époque, le quartier d'Erbet, à Clermont-Ferrand, raconte-t-elle dans La Racaille de la République. Dans ce quartier, il n'y avait pas de mélange. Quand je suis née, 99 % de la population était d'origine algérienne ou du nord du Maghreb. J'ai vécu dans un village arabe, algérien."

Ses parents, qui ont dix enfants, sont tous deux analphabètes. "Mon père a appris à signer, et il sait signer son nom, rien d'autre", poursuit-elle dans son livre. Fadela, qui connaît une scolarité chaotique, s'engage dans le militantisme dès l'adolescence en montant une marche civique pour encourager les jeunes de Clermont-Ferrand à s'inscrire sur les listes électorales, puis en créant une Association des femmes pour l'échange intercommunautaire. En 1983, elle participe à la Marche des beurs avant d'adhérer, en 1986, à SOS-Racisme, dont elle deviendra l'une des permanentes. En 2003, après les états généraux des femmes des quartiers et la mort de Sohane, une jeune fille brûlée vive par son ex-petit ami, elle fonde Ni putes ni soumises.

Sa culture politique s'est forgée au sein de SOS-Racisme, association née dans le sillage du Parti socialiste. "Fadela venait du fond du fond, elle était en province, elle n'avait pas fait d'études mais elle avait un truc : c'était une révoltée, se souvient l'un des anciens présidents de SOS-Racisme, Malek Boutih. C'était une vraie sauvageonne des quartiers, avec les cheveux en pétard et une grande gueule, mais plus il y avait d'injustice, plus sa combativité augmentait. Les élites politiques, même au Parti socialiste, ont du mal à faire une place à ces jeunes issus des quartiers car ils les bousculent. La nomination de Fadela Amara est donc un geste symbolique important."

Les mouvements féministes, qui ont parfois eu des relations difficiles avec Ni putes ni soumises, notamment pendant la controverse sur le port du voile à l'école - elle était favorable à la loi -, se disent en revanche déçues par sa décision. "Je suis pour le moins étonnée, pour ne pas dire peinée et interloquée, de voir Fadela Amara, qui se réclame du féminisme, travailler au côté de Christine Boutin, qui milite depuis de longues années contre les droits des femmes et contre l'avortement, note l'une des porte-parole du Collectif national pour les droits des femmes, Suzy Rojtman. Je la croyais dans le camp de la gauche."

Mardi 19 juin, à l'issue de leur rencontre dans les jardins du ministère, Christine Boutin a donné rendez-vous à Fadela Amara pour le lendemain matin. "Il faudra lui trouver un bureau", a glissé la ministre à ses collaborateurs. La présidente de Ni putes ni soumises, qui devrait quitter ses fonctions dans les jours qui viennent, s'apprêtait à regagner en métro la Maison de la mixité, dans le 20e arrondissement, quand on lui a signalé qu'une voiture était désormais à sa disposition. "Alors, le métro, c'est fini ?", a plaisanté Fadela Amara. La nouvelle secrétaire d'Etat a finalement quitté l'hôtel de Castries, édifié au XVIIe siècle par le seigneur de Nogent, dans une Citroën bleu marine du ministère.

Anne Chemin

--------------------------------------------------------------------------------
Parcours

1964 Naissance à Clermont-Ferrand.

1986 Engagement à SOS-Racisme.

2002 Etats généraux des femmes des quartiers.

2003 Création du mouvement Ni putes ni soumises.

2006 Parution de "La Racaille de la République" (Le Seuil)

2007 Secrétaire d'Etat chargée de la politique de la ville auprès de Christine Boutin

Article paru dans l'édition du 21.06.07




Rama Yade, la "Condi Rice" de Sarkozy
LE MONDE | 20.06.07 | 15h30 • Mis à jour le 20.06.07 | 15h30
http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-823448,50-925918,0.html

Nicolas Sarkozy voulait sa Condi Rice. Une femme issue des "minorités visibles", comme on dit aujourd'hui, qui représente la France. Une femme jeune (et belle), qui incarne la parité et le renouvellement des générations. Rama Yade était taillée sur mesure pour devenir, à 30 ans, la benjamine du gouvernement, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères et aux droits de l'homme. Le nouveau quatuor du Quai d'Orsay, avec les socialistes Bernard Kouchner, Jean-Pierre Jouyet et Jean-Marie Bockel, a tout pour plaire à "l'ouverture".

Les affaires étrangères, Rama Yade en rêvait. Redoutait qu'on l'enferme dans les questions d'intégration en lui confiant la francophonie. Elle l'avait dit au président, qu'elle continue obstinément à vouvoyer quand lui la tutoie depuis le début. En lui confiant la mission, il lui a intimé l'ordre de ne pas répondre aux médias pendant les premières semaines. D'autres lui ont rappelé la consigne. Un peu inquiets, peut-être, de la liberté de ton de cette jeune femme, qui n'hésitait pas à faire part de ses désaccords à Nicolas Sarkozy pendant la campagne et qui reçoit ses amis en boubou dans son petit appartement sous les toits. Le très feutré Quai d'Orsay devra s'y faire. Mais Rama Yade apprend vite.

Elle a déjà eu plusieurs vies. Une enfance facile au Sénégal, élevée par une mère professeur et un père diplomate, secrétaire particulier du président socialiste Léopold Sédar Senghor. Une deuxième vie dans un quartier résidentiel de Colombes, en banlieue parisienne, son père étant en mission en France. Une troisième dans une cité de Colombes, où sa mère s'est retrouvée brutalement seule à élever ses enfants, se sacrifiant pour leur offrir l'école privée et catholique, sans renoncer à la religion musulmane. Dans une vie récente, Rama Yade était administratrice au Sénat, est devenue secrétaire nationale de l'UMP "pour Sarkozy" et s'est mariée... avec un socialiste.

La jeune secrétaire d'Etat ne sait pas encore en quoi consistera sa mission sur les "droits de l'homme". Elle a été accueillie par Bernard Kouchner dans son futur bureau, a découvert les voitures à vitres fumées, les officiers de sécurité, l'ordre du jour de son premier conseil des ministres. Et les premières attaques : sur son arrogance, son rôle de "vitrine".

Marion Van Renterghem
Article paru dans l'édition du 21.06.07

Index - Contact - Recherche
.