es premières estimations des importations de vêtements en provenance de Chine ont provoqué une vive réaction. Près de trois mois après la suppression des quotas, les industriels européens du secteur, français et italiens en tête, demandent au commissaire européen au commerce, Peter Mandelson, de suspendre l'importation libre de douze types de vêtements en provenance de ce pays. Ils n'ont pas obtenu gain de cause, mais la pression s'accentue.
Guillaume Sarkozy, président de l'Union française des industries textiles (UIT), a dit attendre, samedi 19 mars,
"la bonne décision dans les meilleurs délais".
"La situation s'est extrêmement dégradée ; des importations chinoises sur certains produits ont été multipliées par cinq en quelques mois", a-t-il affirmé. La veille, le ministre français du commerce extérieur, François Loos, avait assuré
"partager l'inquiétude" des industriels français. Selon lui, une
"clause de sauvegarde" (qui bloquerait la hausse des importations)
"doit pouvoir être appliquée".
En un an, les ventes chinoises de vêtements et autres produits textiles (chaussettes, couvertures...) vers l'Union européenne, deuxième marché majeur pour la Chine après les Etats-Unis, ont augmenté de 46,5 %, selon l'organisation professionnelle Euratex. Celles-ci se sont accélérées depuis le 1er janvier, date de la levée totale des quotas.
ABSENCE DE RÉCIPROCITÉ
"Ce n'est pas que nous avons peur de la concurrence (...)
, mais nos partenaires chinois n'acceptent pas les règles d'entrée dans l'OMC", explique M. Sarkozy
. La Chine, grâce à sa monnaie sous-évaluée, détruit, dit-il
, ce qu'il reste des deux millions et demi d'emplois de ce secteur en Europe, dont 200 000 en France."La colère de ces chefs d'entreprise se nourrit de l'absence de réciprocité. La France demande, en effet, depuis plusieurs années, aux pays émergents de baisser leurs droits de douane, car les produits européens sont taxés jusqu'à 80 % alors qu'en échange l'Europe applique aux produits chinois et indiens, notamment, un droit d'importation de 10 %. Les Européens préféreraient privilégier les pays du Maghreb, en vertu de la stratégie européenne de partenariat méditerranéen (Tunisie, Maroc, Turquie, Egypte...) initiée il y a dix ans.
Dans ce concert de critiques, il existe des voix dissonantes. Selon un rapport de la banque britannique HSBC, publié vendredi 18 mars, l'abolition des quotas d'importation textile permet à la Grande-Bretagne, par exemple, de conserver un taux d'inflation modéré. Si les prix baissent de 5 % par an, l'inflation sera elle-même réduite de 0,2 % à 0,3 %. Par ailleurs, note HSBC, les vêtements à bas prix dopent les dépenses en habillement en Grande-Bretagne, elles ont bondi de 75 % depuis 1997 et permettront aux nombreuses chaînes de magasins de vêtements, gros acheteurs de produits chinois, d'économiser de 20 % à 30 % sur leurs achats dans les cinq prochaines années.