Lisbonne en mars 2000, les Européens ont adopté l'idée que la croissance et la compétitivité économique de l'Union passaient par un accroissement de l'effort d'innovation et de recherche. Janez Potocnik, le commissaire européen à la recherche, a repris à son compte les objectifs de son prédécesseur, Philippe Busquin : consacrer 3 % du produit intérieur brut (PIB) européen à la recherche en 2010, contre moins de 2 % aujourd'hui.
A mi-parcours, on est encore loin du compte. Seuls des pays scandinaves approchent ou ont atteint ce but. Il est vrai que la Commission tablait sur une forte croissance de l'investissement des industriels, mais ceux-ci tardent à répondre. La Commission se voit donc contrainte de compter essentiellement sur les efforts des Etats, et sur sa capacité à les coordonner. C'est le but de la construction d'un
"espace européen de la recherche". L'Union multiplie les appels à l'abaissement des barrières fiscales, sociales et administratives à la mobilité des chercheurs : 350"centres de mobilité"destinés à les épauler sont en train d'ouvrir, avec le soutien de la Commission, à travers toute l'Europe. Mais les chercheurs sont toujours en attente d'un véritable
"statut unique",
qui se heurte à l'extrême variété de leurs situations : selon les pays, leur employeur principal peut être l'Etat, les universités, publiques ou privées, ou des structures de droit privé, entreprises ou fondations.
FINANCEMENT INDÉPENDANT
La création d'un "conseil européen de la recherche" chargé, à partir de janvier 2007, de financer directement les laboratoires sur le seul critère de "l'excellence" scientifique est une autre initiative-clé de la Commission. L'objectif est de créer, à l'échelon du continent, une source de financement indépendante des priorités de chaque Etat.
Enfin, la Commission souhaite que le 7e Programme cadre de recherche et développement (PCRD 2006-2009), qui permet de concentrer les financements sur les thèmes jugés prioritaires à Bruxelles, soit doté de 30 milliards d'euros, soit le double du précédent. Mais la décision appartient aux gouvernements. Or ces derniers, convaincus de l'importance de l'innovation pour la croissance de leur propre Etat, ont également élaboré des stratégies de relance de la recherche. L'exemple le plus flagrant est sans doute celui en France des "pôles de compétitivité" prévus par la future loi d'orientation et de programmation de la recherche. Le ministère de l'industrie a reçu 150 réponses des 22 régions françaises à son "appel à projets" de pôles de compétitivité, censés agréger, à l'échelle d'un territoire, le potentiel des laboratoires de recherche et des entreprises innovantes autour de "technologies clés". Le gouvernement ne devrait en retenir qu'une dizaine. Or, la communauté scientifique s'accorde à penser que, pour chacune des technologies jugées "porteuses" de création de valeur pour l'avenir, il n'existe que deux à trois véritables pôles d'excellence à l'échelle... de l'Europe !