Deschamps claque la porte

19/09/2005 Par AXEL CAPRON
De Sports.fr La défaite concédée face à Rennes (0-2) lors de la 7e journée de L1 a été de trop. Didier Deschamps a informé lundi matin ses joueurs de sa décision de démissionner de son poste d'entraîneur de l'AS Monaco, avant de quitter le centre de la Turbie, sans diriger la séance du jour. Une décision communiquée la veille au président Michel Pastor, ce dernier ayant accepté le départ de celui qui, pour ses débuts d'entraîneur, aura connu des hauts (finale de la Ligue des champions 2004) et des bas, avec notamment ce début de saison calamiteux.

Depuis la semaine dernière et des déclarations qui avaient fait couler beaucoup d'encre sur le Rocher et au-delà ("Je ne pense pas que Monaco est un grand club") au cours d'une conférence de presse qu'il provoqua lui-même, on savait que le sort de Didier Deschamps à la tête de l'équipe-première de l'ASM ne tenait plus qu'à un fil. Le fil s'est rompu dimanche, coupé par une formation de Rennes qui n'a pas eu à puiser dans ses réserves pour profiter de la fébrilité, de la maladresse et de la nervosité de Monégasques déboussolés (2-0). A l'issue de la rencontre, la décision de l'entraîneur était prise, restait à la communiquer au président Michel Pastor, puis aux joueurs.

"J'ai eu M. Deschamps ce matin au téléphone. Il m'a annoncé officiellement sa démission téléphoniquement. M. Deschamps a ensuite parlé aux joueurs. Je l'ai vu à 11 heures 30 où il m'a remis sa démission. Et bien entendu, je l'ai acceptée. J'ai l'habitude, dans mes affaires, lorsque quelqu'un me remet sa démission de l'accepter", précisera en début d'après-midi Michel Pastor.

La deuxième défaite de la saison de l'ASM à Louis II et la 15e place au classement de L1 qui l'accompagne ont donc eu raison d'un entraîneur arrivé en juin 2001 sur le Rocher, sorti de la pochette-surprise du président de l'époque, Jean-Louis Campora, alors qu'il terminait une ultime saison ternie par de nombreuses blessures sous le maillot du FC Valence. Un président avec lequel les relations deviendront assez vite orageuses, le coach de l'ASM remportant finalement son bras de fer avec Campora, «démissionné» en juin 2003. Auparavant, Deschamps connut une première saison délicate en raison de sa méconnaissance d'une Ligue 1 qu'il avait quittée depuis 1994 et son départ de Marseille à la Juventus.

Le départ de Campora intervint juste après que Didier Deschamps eut remporté son premier titre en tant qu'entraîneur, la Coupe de la Ligue, avec en outre une qualification pour la Ligue des champions grâce à la deuxième place de L1. La saison 2003-04 sera celle de la consécration pour un coach autour duquel les joueurs, fidèles à un engagement pris en mai 2003, acceptèrent de faire corps. Alors que les rumeurs bruissaient des départs de Nonda, Giuly ou autres, tous mirent de côté leurs velléités de départ avec à l'arrivée un étincelant parcours en Ligue des champions, malheureusement pour eux mal terminé (défaite 3-0 contre Porto).

Le recrutement en question

Le début de la fin pour Didier Deschamps ? Toujours est-il que la saison 2004-05 sera faite de hauts et de bas, avec un recrutement haut de gamme (Kallon, Chevanton, Maicon, Saviola, Perez...) censé largement pallier les départs de Giuly, Morientes, Prso ou Rothen. Mais faute de complémentarité, ces pseudo stars ne parviendront pas à tirer l'équipe par le haut, l'ASM se faisant sortir en 8e de finale de la Ligue des champions par le PSV Eindhoven avant d'accrocher une troisième place en L1, très loin du champion lyonnais.

Afin d'éviter de commettre les mêmes erreurs, Didier Deschamps demande alors à ses dirigeants de pouvoir disposer d'un groupe quasiment au complet pour la reprise de l'entraînement fin juin, il est entendu, puisque débarquent rapidement Sorlin, Warmuz, Maoulida, Kapo et Gerard, un peu plus tardivement Meriem. Un recrutement qui ne fait guère de vagues... Les résultats auront raison de cette impression avec une élimination au tour préliminaire de Ligue des champions face au Betis Séville qui fait plonger mentalement un groupe jugé après-coup trop limite.

Evra, Bernardi, Givet, Roma s'en émeuvent publiquement, provoquant une crise interne dans le club et la remise au pas des impétrants par le président Michel Pastor qui ne se prive pas au passage d'égratigner Didier Deschamps, avec lequel le recrutement a été effectué "en parfaite harmonie". Du coup, ce dernier décide de sortir de son silence et de convoquer la presse le 12 septembre, un raout médiatique au cours duquel l'ex-détenteur du record de sélections en équipe de France (103) justifie le piètre début de saison de Monaco par le changement de politique maison: "L'AS Monaco a décidé de changer de politique en ayant pour objectif la "mise à zéro" sur le plan économique. Forcément, je n'ai pas sauté de joie en apprenant ce changement, je l'ai accepté (...) J'aurais souhaité comme les cadres de l'équipe qui l'ont exprimé avoir deux joueurs supplémentaires pour être armé."

Les Cissé, Baros et Fred espérés sur le Rocher ne sont jamais venus, la pilule semble avoir été trop difficile à digérer pour Didier Deschamps qui terminait sa conférence de presse par la fameuse déclaration-choc: "Monaco est un bon club du Championnat de France, je ne pense pas que c'est un grand club en raison des moyens économiques et des résultats sportifs limités." Dès lors, la rupture semblait consommée entre «DD» et le club, les supporters et de glorieux anciens comme Jean-Luc Ettori montant alors au créneau pour reprocher ces propos au technicien. "Si Monaco est un petit club, Deschamps a le salaire de l'entraîneur d'un grand club", raillait samedi dans L'Equipe un représentant des Ultras monégasques qui avaient déployé une banderole "DD, nous sommes un grand club, respecte nos couleurs" à l'occasion de la réception de Willem II en Coupe de l'UEFA.

La défaite contre Rennes a fini par pousser Deschamps à déposer les armes... mais nul doute que l'homme saura rebondir.