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Garde alternée: au nom des femmes?



Largement présentée dans les medias ainsi que par les associations de pères comme une prérogative intemporelle des mères, la garde des enfants n’est en réalité confiée aux mamans que depuis … 100 ans.
En Europe en effet, jusqu’au début du XXe siècle, en cas de décès ou séparation des parents, la responsabilité des enfants était automatiquement dévolue au père ou à sa lignée. Libre ensuite au père de confier le soin des enfants à n’importe quelle femme (grand-mère, nourrice, nouvelle épouse…) ou de les abandonner.

Ce sont les revendications féministes du droit au divorce et une attention accrue à l’intérêt de l’enfant qui conduiront les tribunaux à reconnaître progressivement aux mères – quand leur conduite est jugée suffisamment morale – la possibilité d’obtenir la garde en cas de divorce.
Dans les années 50, en Angleterre, apparaissent les « ancêtres » de la garde alternée : des ordonnances de garde divisée (split orders) sont rendues, où le tribunal ne laisse aux mères jugées indignes que la garde physique des enfants (les tâches relatives aux soins), en réservant au père leur garde légale, c’est-à-dire l’autorité parentale (pouvoir de décision sur l’orientation religieuse, l’éducation de l’enfant, etc).

Jusqu’en 1970, en France, seule existe la « puissance paternelle ». La loi du 4 juin 1970 instaure la notion d’autorité parentale conjointe, partagée par le père et la mère. Au Québec, il faudra attendre 1980, au Maroc, 2004.
Au cours des années 70, la seconde vague féministe développe l’idée d’un partage des tâches de soins aux enfants, entre la mère et le père. En réclamant un plus grand investissement des pères, le mouvement féministe permet aux hommes de rompre avec les clichés traditionnels du père pourvoyeur pour s’autoriser une relation plus étroite avec les enfants. Petit à petit, les pères vont donc s’investir davantage dans l’éducation et le soin aux enfants, donnant naissance dans les années 80/90 à l’image du « nouveau père », largement relayée par le cinéma et la télévision.

Parallèlement, toujours sous l’impulsion du féminisme, le concept de neutralité sexuelle se développe dans la plupart des démocraties occidentales. Objectif : éliminer les discriminations sur la base du sexe dans les corpus juridiques. C’est dans le prolongement de cette recherche d’égalité que naît le concept asexué de « parent », qui va remplacer dans nos textes de loi les termes de « père » et « mère ». Les « parents », égaux en droits avant séparation, doivent l’être aussi après le divorce.

Mais si la symétrie en terme de droit se renforce à la fin du XXe siècle, la réalité statistique reste, elle, obstinément asymétrique : l’essentiel de la charge des soins aux enfants dans le couple demeurent portée par un seul des deux « parents », la mère. En moyenne en Europe, les pères consacrent en effet 15 minutes par jour à chaque enfant… Quant au partage de la charge du ménage, les chiffres parlent d’eux-mêmes : dans un couple avec enfant, la mère consacre de 3h à 4h30 au ménage s’il y a un enfant, 5h s’il y en a 2, 5h30 s’il y en a trois. Le père, quel que soit le nombre d’enfants, n’y consacre que 1h30 par jour. La répartition du travail parental, avant séparation, est donc inégalitaire en terme de temps, mais aussi du point de vue du type de travail fourni : le père joue, suit les devoirs, mais s’il donne volontiers le biberon, c’est la mère qui le plus souvent le prépare et le stérilise, ou pense à acheter le lait en poudre, et quand papa donne le bain, c’est en général maman qui nettoie ensuite la baignoire, éponge le sol et lave les serviettes de bain. Sans oublier que la charge mentale que représente le soin aux enfants (préparer le goûter pour l'école, prendre rendez-vous avec l’orthophoniste, etc...), reste également massivement dévolue aux mères.

C’est dans ce cadre donc que prend forme dans le monde occidental, au cours des années 80, l’idée d’une garde partagée des enfants après un divorce, sans qu’il y ait eu nécessairement partage du travail de soin parental avant le divorce. En 1979, la Californie ouvre le bal, en instaurant une présomption de garde partagée en cas de divorce. En 1998 l’Allemagne instaure le « gemeinsames Sorgerrecht », la France, en 2002, autorise la résidence alternée et la Belgique examine en 2005 l’instauration de la garde alternée comme modèle en cas de divorce.




Mise à jour: 22/03/05 | Retour en haut de page |