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Livres:
  • Les violences envers les femmes en France
    La Documentation Française, 2002

  • Les attaques contre les enquêtes sur les violences envers les femmes
    dans Nouvelle Questions Féministes, 2003

Liens:


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Violences conjugales: Les chiffres | Violences conjugales: Interview

Violences conjugales



Les chiffres


I. Les chiffres en Europe

Il n’existe encore aucune étude harmonisée sur les violences conjugales en Europe.
Les chiffres qui sont divulgués dans chacun des pays membres pourraient être différents seulement parce que les méthodes de recueil de données diffèrent ( nombres de plaintes déposées, questionnaires, associations plus ou moins fortes…)

Cela dit, quelques chiffres parlent d’eux-mêmes :

  • Dans l’ensemble des pays de l’UE, 1 femme sur 5 au moins subit au cours de sa vie des violences infligées par son mari ou par son compagnon.

  • En Europe chaque semaine, une femme est tuée par son conjoint (commission européenne pour l’égalité des chances- Conseil de l’Europe- juillet 2002)

  • Pour les femmes de 14 à 45 ans, la violence familiale est la première cause de mortalité

  • 1 seul cas sur 20 est signalé à la police (Enquête Eurobaromêtre- 1999)

Les enquêtes sont difficiles à mener : elles révèlent le tabou qui existe encore sur le sujet.
Au niveau européen, le programme Daphné essaye de faire avancer les choses. L’union européenne finance ainsi des projets de lutte contre toute forme de violence.

En France, la seule véritable enquête nationale sur les violences envers les Femmes, l’ENVEFF a été publiée en juin 2001 et a fait l’effet d’une bombe : une femme sur 10 est victime de violences conjugales, 6 femmes en meurent chaque mois. Des chiffres confirmés par le sondage IPSOS/Marie-Claire publié en février 2005 : « 10% des femmes interrogées affirment qu’au cours de leur vie actuelle ou passée, il leur est déjà arrivé « plusieurs fois » que leur partenaire les gifle ou les frappe ou qu’il les oblige « plusieurs fois » à faire l’amour alors qu’elles leur avaient dit ne pas le vouloir. ». D’après l’enquête ENVEFF, Le profil de l’agresseur concerne majoritairement des hommes bénéficiant par leur fonction professionnelle d’un certain pouvoir. On remarque une proportion très importante de cadres (67 %), de professionnels de la santé (25 %) et de membres de la police ou de l’armée. 70 % des agressions conjugales se sont produites alors qu’aucun des deux partenaires n’avait bu.

  • En Allemagne, 14,5% des femmes ont subi des violences sexuelles par des membres de la famille (Lobby européen des femmes). 3 femmes sont assassinées tous les quatre jours par les hommes avec lesquels elles vivaient : soit près de 300 par an.

  • En Norvège 10 000 femmes reçoivent des soins pour dommages corporels engendrés par la violence conjugale.

  • En Finlande : 22% des femmes qui vivent en couple disent avoir été victimes de violences physiques ou sexuelles.

  • En Grande-Bretagne, les femmes battues représentent près d’1/4 de la totalité des femmes.

  • En Belgique : Une femme sur 5 est victime de violence domestique.


II. Les politiques de lutte contre la violence conjugale

La conférence de Pékin en 1995 :

La conférence mondiale des Nations Unies sur la femme qui s'est déroulée à Pékin en 1995 a été le déclencheur d’une prise de conscience globale sur la situation des femmes et a permis l’émergence de plans nationaux de lutte pour la défense des droits des femmes.
Les délégués des 185 pays et les 70 000 représentants de la société civile ont rédigé une déclaration et un programme d’action afin que les Etats prennent conscience des conditions économiques des femmes, les protègent contre la montée de la violence et rehaussent le statut des fillettes. Les points avancés s’attachent au droit des femmes à l’héritage, à la libre décision des femmes concernant la sexualité et la grossesse, à la non-discrimination des femmes du fait de leur statut de mère. Le viol marital, les coups et blessures dans les foyers, les mutilations sexuelles sont reconnus comme des actes de violences à l’encontre des femmes et une infraction à leurs droits fondamentaux.
A la suite de cette conférence de nombreux réseaux voient le jour : WAVE (Women Against Violence in Europe). Le WISE Network est un réseau de chercheurs sur les études liées aux femmes (gender studies)


1.Les différents modèles par pays : comment lutter contre les violences conjugales ?

Certaines sociétés ont un arsenal législatif et associatif développé qui permet d’aider efficacement les femmes victimes de violence. Les pays nordiques, connu pour leur égalitarisme, ont ainsi le plus grand nombre de refuges pour femmes. Parmi les modèles législatifs, celui de l’Autriche a été le premier à imposer de force l’éloignement du conjoint violent. L’Espagne, la France et la Belgique font de sérieux progrès pour punir pénalement l’auteur de violences, même quand celles-ci sont perpétrées dans la sphère privée. En Angleterre, il existe une loi qui permet de forcer la victime à porter plainte, toutefois cette procédure est peu utilisée. L’Islande, les Pays-Bas, la Grèce n’ont pas de législation spécifique concernant les violences conjugales. Celles-ci sont traitées de la même manière que d’autres violences. Au Portugal, les lois existent, toutefois elles sont peu connues, la société n’ayant pas vraiment pris conscience du problème.

L’Autriche : Le modèle européen ?
En Autriche, les hommes politiques ont très vite adopté des mesures pour faire diminuer la violence conjugale sous l’impulsion des associations féministes et de la société civile. La loi de 1997 est une loi globale qui propose une solution « durable » à la violence. L’Autriche a été la première en Europe à imposer l’éloignement du conjoint violent – au moins 10 jours. Les centres de soutien vont vers les victimes et n’attendent pas que celles-ci se déplacent. Des programmes spéciaux permettent de traiter les hommes violents, afin qu’ils prennent conscience de leurs actes. L’Autriche a mis en place des programmes de sensibilisation et de formation, en particulier pour les policiers. Ces cellules d’intervention globale (policiers, associations d’aide aux hommes violents, associations sociales, juges) sont devenues un modèle pour toutes les politiques européennes. Elles préfigurent l’idée que seule une action globale pourra aider à résoudre le fléau.

Allemagne
BIG à Berlin : "Berliner Interventionszentrale bei häuslicher Gewalt" (Cellule d’intervention pour les violences conjugales) créée en 1994, BIG est un modèle national, rassemblant tous les acteurs de la violence conjugale. Les policiers, les juges, les médecins, les associations féminines, et les autres acteurs sociaux se sont ainsi coordonnés pour établir une stratégie globale afin de régler le problème de la violence. Depuis 2002, le projet est étendu et repris dans le reste de l’Allemagne.

Espagne
Le gouvernement de Zapatero a décidé de faire changer les mœurs espagnoles. Entre 2002 et 2003 les violences conjugales ont augmenté de 34%. C’est le meurtre d’Ana Orantes en 1997 qui a réveillé les consciences. Elle avait auparavant témoigné de son calvaire à la télévision et fut ensuite assassinée par son mari.
Le gouvernement de Zapatero veut mettre en place une « loi intégrale contre la violence de genre ». L’objectif est de lutter globalement contre la violence envers les femmes. Il faut donc se battre à tous les niveaux. Le gouvernement veut réformer l’éducation et promulguer de nouvelles lois sur la publicité. Des centres d’urgence et de récupération pour les femmes maltraitées doivent être créés. Des systèmes d’aide financière et juridique pour les femmes qui veulent quitter le domicile conjugal sont mis en place petit à petit. 400 postes de juges spécialisés ont été ouverts.

Les pays de l’Est : la montée de la violence ?
Dans les pays de l’Est, avant 1990, les problèmes de violence envers les femmes étaient largement sous-estimés par les pouvoirs publics. Avec la transition vers la démocratie et vers l’économie de marché, la situation des femmes a empiré et les violences à leur encontre ont augmenté. Les anciennes politiques sociales qui leur permettaient de travailler et qui leur accordaient des bénéfices n’existent plus. Les autorités, les médecins et la police ne prennent pas suffisamment en compte leur situation particulière. La société civile, quant à elle, n’est pas assez organisée pour lutter seule contre ces violences.

-En Pologne, l’influence très marquée de l’Eglise catholique imprime une vision traditionaliste de la famille sur la politique. Ainsi, depuis 1993 l’IVG est interdite. Dans les cas de violences conjugales, la cellule familiale prime sur la sécurité de la femme. Il est toujours difficile pour les femmes d’obtenir des certificats médicaux prouvant les coups et blessures, de trouver des témoins acceptant de parler pour les soutenir : éléments pourtant indispensables lors d’un jugement. Souvent la violence envers les femmes est expliquée par l’alcool, ce qui est réducteur et ne permet pas une prise de conscience collective.

-En Estonie, les femmes sont obligées de se battre - et elles manifestent avec des équipements pour hockeyeurs- pour faire accepter le problème dans la législation…

-En Lettonie, il n y a pas de loi pour protéger les femmes. Il n’existe aucune structure d’hébergement pour les femmes. En cas de violence l’auteur peut être retenu pour trois heures en garde à vue.

-En Slovaquie, une nouvelle loi a été votée au printemps 2003. Elle prévoit l’éviction du conjoint violent du domicile conjugal quand la femme est reconnue victime. Une unité de police spécialisée dans la violence conjugale dirigée par des femmes a été créée.

-En Slovénie, les actes de violence sont punis quand il s’agit de cas graves. Les nez cassés et les côtes brisées, sont considérés comme des blessures légères et non punies par la loi.

Canada
Au Canada, les statistiques gouvernementales établissent que 98 % des agressions sexuelles et 86 % des crimes violents sont commis par des hommes. Les femmes représentent 98 % des victimes de violence conjugale sous forme d'agression sexuelle, d'enlèvement ou de prise d'otage, 80 % des victimes de harcèlement criminel sont des femmes alors que 90 % des personnes accusées sont des hommes. Une violence contre les femmes en hausse dans un pays où les acquis du féminisme sont pourtant plus importants qu’en France ou même en Allemagne.
Face à ce paradoxe, un rapport du gouvernement conclut : « Certaines études laissent entendre qu'une plus grande égalité des sexes (mesurée par les niveaux de scolarité, d'emploi et de revenu) contribue à une augmentation du nombre d'homicides commis contre les femmes. Selon cette théorie, à mesure que les femmes améliorent leur situation sociale par rapport à celle des hommes, elles deviennent plus vulnérables. » Cette analyse permet de mieux comprendre pourquoi les chiffres de la violence conjugale sont nettement plus élevés dans les pays occidentaux où l’émancipation des femmes bat son plein (Espagne, Québec, France, Allemagne…) que dans les pays latins où la forte tradition patriarcale n’est pas encore trop remise en cause par les femmes (Grèce, Italie, Portugal…). Ce qui ne constitue pas une raison pour mettre un frein à l’émancipation féminine car, poursuit le rapport canadien, « d'autres études ont révélé que l'égalité des sexes diminuait la vulnérabilité des femmes car en devenant plus indépendantes financièrement et personnellement, il leur est plus facile de quitter des situations où elles sont les plus vulnérables ». (Rapport sur la détermination de la peine dans les cas d'homicides involontaires coupables commis dans le cadre d'une relation intime)




Mise à jour: 24/03/05 | Retour en haut de page |