Mode

Mode Prêt-à-porter hommes printemps-été 2006

Du polo au kimono

Tonalités minérales chez Hermès, élégance arty pour Demeulemeester: look recherché et zen attitude sont l'apanage du mâle moderne.

par Sabrina CHAMPENOIS et Françoise-Marie SANTUCCI et Olivier WICKER
QUOTIDIEN : mardi 05 juillet 2005

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«You really got me», c'est l'air des Kinks qui allume le show Hermès. A la fin du défilé, cette déclaration, brutale et directe, aurait pu être reprise par l'assistance à destination de Véronique Nichanian, tant tout ce qu'elle a proposé est bluffant. La directrice artistique de la marque a déroulé une palette de couleurs à l'énoncé minéral et onirique («bois, orage, ardoise, feuille, silex, maïs, blanc»). Alors que beaucoup de ses confrères se facilitent la tâche en brodant et débrodant les figures récurrentes du vestiaire masculin (pirates, garçons de plage, marins), elle travaille scrupuleusement à construire la silhouette d'un homme très contemporain, tout sauf imaginaire. Des pantalons droits, des pulls à col en V très près du corps, des chemises aux imprimés géométriques qui rappellent les années 60, d'autres imprimés plus baroques (l'un intitulé «Jardin d'Arménie», hommage aux origines de la dame ?) On voit aussi une réhabilitation définitive du polo avec une gamme de modèles fluides sur la peau et un blouson de moto clair qu'on porterait bien pour traverser Londres en pleine nuit sur une vieille Norton.

Le goût de Londres, Paul Smith est un de ceux qui sait mieux le transmettre. Mais pour ne pas étouffer dans ses célèbres rayures multicolores et ses chemises à fleurs, le créateur anglais fait un pas de côté vers un style plus sobre, en gris et blanc, apaisé et savamment «débranché» ­ tout comme la bande-son qui donnait des versions unplugged des Stanglers ou de Bowie. Un style recommandé pour les hommes d'affaires zen.

L'homme d'Ann Demeulemeester est plus du genre (pré) occupé par des interrogations existentielles (comment régler la dette du tiers-monde ? Où trouver un bon nettoyage à sec ?): dans un musée Bourdelle blindé de Japonais, des jeunes hommes genre roseaux fragiles défilent l'échine un peu courbée, sur un air de Nick Cave, ne repoussent pas la mèche qui parfois leur tombe sur l'oeil. Leurs silhouettes longilignes sont glissées des vestes en coton froissé ou en lin (blanc cassé, bleu, rose pâle, gris ou noir) portées sur des petits gilets sans manches en coton piqué de pois, à même le torse, ou alors sur deux tee-shirts superposés, le premier façon résille révélant l'autre. En bas, des corsaires relevés au genou par une patte boutonnée, en tout cas fluides, parfois avec effet de saroual. Et aux pieds, des baskets customisées ou des derbys portés sans lacets. Au total, une élégance arty, un négligé aimablement destructuré, parfois spectaculaire, comme cette veste blanc cassé plutôt ajustée, portée col relevé et seulement boutonnée à la glotte, qui donne un bel air Petit Prince.

Rien à voir avec le house boy de l'Anglais Kim Jones, qui assume des combinaisons-shorts ou bermudas genre Babygros, des pantalons façon survêt à pans de tissus multicolores flottant sur les côtés, des miniblousons à imprimé écossais. Coiffés d'une sorte de bonnet de bain transparent à perles de couleur, ces garçons-là, comme droit sortis d'un shooting de Bruce Weber, affichent sans ciller leurs pectoraux joliment travaillés en salle de muscu et servis par une garde-robe street-wear allègre : jeu de soufflets, de Zip, de longueurs (souvent relevées dans le dos), de lanières (qui resserrent le pantalon au-dessus du genou), large palette de couleurs (du crème au vert chlorophylle en passant par le rouge sanguin, le rose bonbon). A noter de très chouettes vestes satinées, façon kimono.

Pour Balenciagia, Nicolas Ghesquière perpétue un classicisme chic, où le détail compte, où la matière respire la noblesse sans ostentation. Présentée en showroom, sa collection navigue entre inspirations «coloniale, militaire, marine, sportive, rock», a priori rien de bien neuf à l'horizon, sauf à y regarder de plus près : le blouson en daim camel doublé de soie, la saharienne militaire à double col, poches dorsales et intérieures, les polos multicolores et graphiques, le trench noir à boutons recouverts... Les pièces de choix abondent, à destination d'un garçon à la décontraction suave, qui associe un tee-shirt figurant un guitariste metal à genoux avec le sublime blazer noir à un bouton en laine froide, et part en RTT avec son sac «weekender» en cuir violine.

Photo Matthieu Zazzo


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