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Dave Sinardet: « On réduit l’image de la Flandre à une partie de la Flandre, une minorité »

Dave Sinardet Politologue à l’Université d’Anvers
propos recueillis par PHILIPPE DE BOECK
Le Soir jeudi 29 mai 2008, 09:43

Politologue à l’Université d’Anvers, Dave Sinardet a fait sa thèse de doctorat sur l’image des Wallons et des Flamands dans les médias. Voici son analyse sur l’image de la Flandre.

Cette image d’une Flandre intolérante, fascisante, est-elle correcte ou faussée ?

La question est d’abord de savoir si la Flandre a une image à l’étranger. Est-ce que la Flandre est connue? À l’étranger, l’on sait à peine situer la Belgique sur une carte. Ensuite, si image il y a, est-elle vraiment mauvaise? Pour être fixé, on devrait d’abord réaliser une étude de contenu représentative de la représentation de la Flandre/de la Belgique dans un nombre de médias étrangers. Maintenant, on a bien sûr tendance à surtout remarquer l’information excessive, comme celle qui a été relayée dans les éditions du International Herald Tribune il y a deux semaines, par exemple. Mais il y a aussi d’autres médias. Et le Herald Tribune publie régulièrement sur la Belgique. Seulement, quand c’est plus nuancé, on n’en parle pas en général. Pour le reste, il est très difficile de dire si une image est correcte ou incorrecte.

Comment peut-on décrire cette « image de la Flandre » ?

Est-ce que la Flandre est fermée, intolérante et séparatiste ? Oui. Est-ce que la Flandre est ouverte, tolérante et fédéraliste ? Oui. Mais l’on a souvent tendance à se focaliser sur les premiers aspects et pas sur les autres. Ce faisant, on réduit l’image de la Flandre à celle d’une partie de la Flandre, d’une minorité. Toutes les études sérieuses montrent que le nombre de séparatistes en Flandre se situe autour des 10 %. Le racisme y existe, notamment avec le Vlaams Belang. Mais dans d’autres pays européens aussi, il y a des partis d’extrême droite forts. Des pays comme la France (avec Le Pen au deuxième tour de la présidentielle en 2002), les Pays-Bas ou l’Autriche sont-ils racistes pour autant ?

La presse étrangère aurait une mauvaise image de la Flandre parce qu’elle ne lirait que la presse francophone qui la dépeindrait toujours en de « mauvais termes ». N’est-ce pas donner beaucoup (trop) de pouvoir à ces médias francophones ?

La presse francophone – qui a parfois aussi tendance à se focaliser sur les aspects racistes et séparatistes de la Flandre – peut effectivement influencer la couverture de la Flandre par la presse internationale. Les correspondants étrangers connaissent plus souvent le français que le néerlandais. Ils reçoivent donc leurs informations sur la Flandre à travers la presse francophone; ce qui peut donner une image incomplète. Je trouve que l’information sur la Flandre et la Belgique dans des journaux hollandais comme le Volkskrant ou le NRC Handelsblad est généralement plus nuancée que dans des quotidiens français. Pourtant, il ne faut pas exagérer. Dire que ce n’est que la faute des francophones en Belgique – comme certains au parlement flamand semblaient avoir tendance à le faire concernant le Wooncode – est trop facile et témoigne d’un complexe de Calimero et d’une incapacité à se remettre en question. Et si quelqu’un comme le ministre Keulen ne communique qu’en néerlandais avec des médias étrangers, cela n’aide pas.

Le vrai problème n’est-il pas tout simplement lié au fait que ces « tracasseries » flamandes vont à l’encontre d’une Europe de la diversité où langues et cultures sont aussi diverses que variées ? Un cas comme celui de la plaine de jeux de Liedekerke, que ne pouvaient fréquenter que ceux parlant suffisamment bien le néerlandais, est quand même grave, non ?

L’exemple de Liedekerke est assez problématique. Mais le règlement en question a directement été cassé par le ministre Keulen. L’on peut se demander si ce fait est vraiment si important pour que la presse internationale y porte tant d’attention. À nouveau, on focalise surtout sur ce type d’éléments qui correspond déjà à une certaine image que l’on a de la Flandre. Et l’on a tendance à interpréter certains éléments selon des critères qui ne sont pas toujours de mise. Bien sûr, l’on peut avoir des critiques envers le Wooncode. Mais ce n’est pas une décision qui a été prise pour des raisons communautaires, sauf peut-être pour quelques-uns. L’on essaye surtout de résoudre un problème social et d’émancipation. Le Wooncode est-il le bon moyen pour cela ? On peut en discuter. Mais si l’on dit seulement que c’est du racisme et de la discrimination de francophones, on ne discute pas. Ce qui m’a frappé, ce sont les réactions assez différentes en Belgique francophone envers l’affaire de la Société de logement social à Namur. Ici, on décide de ne pas attribuer des logements sociaux à des ressortissants non-UE tant qu’il n’y a pas d’autres locataires non-UE qui partent. C’est bien sûr discriminatoire. Mais le président de la société et le bourgmestre de Namur se défendent en disant que c’est pour faire quelque chose contre la formation de ghettos. Et ici, les réactions sont beaucoup plus nuancées: oui, il y a un problème avec le règlement, mais les intentions sont bonnes. Prenons cela comme le début d’un débat sur la question, disait André Antoine, tandis qu’il n’a jamais voulu avoir un débat sur le Wooncode, directement jugé comme l’émanation d’une « Flandre » intolérante et repliée sur elle-même.

Comment faire pour sortir de cette spirale communautaire ?

En Flandre, on devrait pouvoir avoir un débat plus ouvert sur la question linguistique et sur la minorité francophone. Mais cela n’aide pas si du côté francophone on a tout de suite tendance à définir tout ce qui est lié au principe de territorialité comme de l’intolérance ou du séparatisme. Les Québécois (avec lesquels il ne faut pas être d’accord nécessairement non plus), les francophones ne les traitent pas d’intolérants ou de séparatistes, tandis qu’ils défendent le principe de territorialité avec au moins autant de vigueur que les Flamands (d’ailleurs, au niveau de la population, les Québécois sont beaucoup plus autonomistes que les Flamands). Il ne faut pas nécessairement être d’accord avec une scission de BHV ou avec le refus d’élargir Bruxelles. Mais cela n’a, dans le fond, rien à voir avec le séparatisme. La frontière linguistique n’a pas été tracée en 1963 pour des raisons séparatistes. Vouloir la garder aujourd’hui, non plus.

Sources:
http://www.lesoir.be/forum/a_bout_portant/article_601757.shtml
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